jeudi 10 décembre 2015

COP21: Les brouillons se succèdent et se ressemblent, Les négociateurs africains en touriste à Paris !

Pas moins de trois brouillons de l’accord de Paris sur le climat sont tombés ce mercredi 9 décembre. Le dernier rendu public par les négociateurs dans la soirée est sans doute celui qui sous réserve des observations des ministres de l’environnement sera paraphé par les Chefs d’Etat.
Il ne reste plus que 24 heures aux négociateurs pour proposer un accord historique sur le climat. Le texte adopté par les 195 Etats partis à la fin de la première semaine d’échange a servi de base de travail aux négociateurs.

 Les choses sont allées très vite car les voix de la société civile ont commencé à dénoncer un certain laxisme dans les échanges en raison du culte des intérêts qui a refait surface. Sur des enjeux importants, les pays riches ont continué d’imposer leur véto pour éloigner la Communauté Internationale d’un accord contraignant. D’ailleurs, l’expression chantée à tout va depuis le début de la COP21 semble avoir disparu du discours officiel. Les différentes délégations ne parlent plus que d’un simple accord censé protéger la planète et réduire les émissions de gaz à effet de serre en deçà des 1,5 degré. Il est bon d’indiquer que le dernier brouillon proposé par les négociateurs contient moins de crochets et d’options. Le texte s’affine et maintient la limitation du réchauffement climatique mais ne propose ni une feuille de route, ni les moyens encore moins le mécanisme pour y arriver. Des généralités vagues avec un contour plus que flou minent le dernier brouillon et inquiètent sérieusement les observateurs. En effet les questions de financement et d’adaptation ne sont prises en compte qu’à partir de 2020 ! En d’autres termes, les pays vulnérables devront eux-mêmes financé leurs projets sur la période 2016 – 2020. Aucun mécanisme de révision des engagements n’est indiqué même sur le post-2020 et les chapitres relatifs à la question sont toujours entre crochet. Une seule note de satisfaction, le dernier brouillon mentionne les énergies renouvelables mais ne dit pas clairement que les Etats partis s’engagent à tourner le dos aux énergies fossiles. Voici un des points pour lesquels des opposants à un accord ambitieux s’agitent. L’Arabie saoudite, chef de file des pays producteurs de pétrole joue des coudes et ne veut pas entendre parler de biomasse, de solaire ou d’éolienne. Au fond, les Etats du Golf ne sont que les arbres qui tentent de cacher la forêt. En back office, ce sont les USA et l’Union Européenne qui poussent à la fronde et qui sans le dire torpillent déjà l’accord. Tous les compromis – y compris les plus destructeurs – sont en train de se sceller dans le secret sans tenir compte des petits producteurs spoliés de leurs terres, des communautés vulnérables, des droits des peuples autochtones et des agriculteurs exposés à la sécheresse ou à la salinisation de leurs terres. « C’est triste car c’est l’une des premières fois où j’assiste à une COP où personne ne tape du poing sur la table » se désole un acteur de la société civile.
Tous responsables au cas où…

Sans colère, sans le moindre sursaut d’orgueil, sans éclat de voix l’avenir de la planète se joue dans une pseudo-négociation pour un accord qui au final ressemblera bien plus à un gentleman agreement…et rien d’autre ! C’était comme si en venant à Paris "certains" avaient déjà rédigé l’accord d’où la colère de la société civile. Pour le montrer, un vaste rassemblement a réuni une centaine de manifestants dans le Hall 2 du site du Bourget non loin des pavillons de la France, des Etats Unis, de la Chine et de l’Arabie Saoudite. Bien avant ce mouvement encadré par la police des Nations Unies, une conférence de presse a été organisée par le Réseau action climat. Au cours des échanges avec la presse, Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France a indiqué que si un accord devait aboutir sur la base du texte présenté il serait juste « un accord sur papier ». Un accord sur papier que devront assumer tous les Etats présents à Paris y compris ceux qui depuis le premier jour se sont placés dans la position de pays vulnérables. Les pays africains ne sont pas en reste car l’Afrique produit une infime partie du CO2 mondial mais subit les effets du réchauffement climatique. Si les 54 pays africains se taisent, ils devront subir un accord qui donnera plus de poids aux gros pollueurs. L’Afrique plutôt absente des débats n’est présente qu’avec une dizaine de négociateurs par session or de nombreuses délégations venues du continent séjournent à Paris aux frais du contribuable. Une désertion qui fait dire à certains acteurs des droits de l’homme que les délégués sont bien plus en tourisme qu’en négociation. « S’ils fuient les salles de négociation c’est bien parce qu’ils n’ont pas les bons arguments face à l’argent des pays riches » déplore un jeune cyber activiste originaire du Tchad. L’odeur de l’argent perturbe à ce point les africains ? Aïssatou Diouf, chargé de plaidoyer changement climatique à ENDA Energie veut bien croire que non. Même si elle se désole que les négociations semblent échapper au contrôle des africains, elle espère qu’une stratégie se peaufine en secret pour que le contient ne puisse pas être laissé. Notons que la journée de négociation du 9 décembre a été marqué par un meeting tardif autour de 20 heures dans la salle des plénières. La rencontre interdit aux médias a permis de présenter la méthode de travail des négociations pour la nuit de mercredi à jeudi. Un premier groupe se réunira autour des points politiques : différenciation, financement et ambition. Les autres points de l’accord seront examinés dans une deuxième réunion en parallèle. On peut sans risque de se tromper dire que c’est la dernière ligne droite et que les délégations travailleront certainement afin qu’un accord définitif soit présenté ce vendredi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire