Pas moins de trois brouillons de l’accord de Paris sur le climat sont
tombés ce mercredi 9 décembre. Le dernier rendu public par les négociateurs
dans la soirée est sans doute celui qui sous réserve des observations des
ministres de l’environnement sera paraphé par les Chefs d’Etat.
Il ne
reste plus que 24 heures aux négociateurs pour proposer un accord historique
sur le climat. Le texte adopté par les 195 Etats partis à la fin de la première
semaine d’échange a servi de base de travail aux négociateurs.
Les choses sont
allées très vite car les voix de la société civile ont commencé à dénoncer un
certain laxisme dans les échanges en raison du culte des intérêts qui a refait
surface. Sur des enjeux importants, les pays riches ont continué d’imposer leur
véto pour éloigner la Communauté Internationale d’un accord contraignant.
D’ailleurs, l’expression chantée à tout va depuis le début de la COP21 semble
avoir disparu du discours officiel. Les différentes délégations ne parlent plus
que d’un simple accord censé protéger la planète et réduire les émissions de
gaz à effet de serre en deçà des 1,5 degré. Il est bon d’indiquer que le
dernier brouillon proposé par les négociateurs contient moins de crochets et
d’options. Le texte s’affine et maintient la limitation du réchauffement
climatique mais ne propose ni une feuille de route, ni les moyens encore moins
le mécanisme pour y arriver. Des généralités vagues avec un contour plus que
flou minent le dernier brouillon et inquiètent sérieusement les observateurs.
En effet les questions de financement et d’adaptation ne sont prises en compte
qu’à partir de 2020 ! En d’autres termes, les pays vulnérables devront
eux-mêmes financé leurs projets sur la période 2016 – 2020. Aucun mécanisme de
révision des engagements n’est indiqué même sur le post-2020 et les chapitres
relatifs à la question sont toujours entre crochet. Une seule note de
satisfaction, le dernier brouillon mentionne les énergies renouvelables mais ne
dit pas clairement que les Etats partis s’engagent à tourner le dos aux
énergies fossiles. Voici un des points pour lesquels des opposants à un accord
ambitieux s’agitent. L’Arabie saoudite, chef de file des pays producteurs de
pétrole joue des coudes et ne veut pas entendre parler de biomasse, de solaire
ou d’éolienne. Au fond, les Etats du Golf ne sont que les arbres qui tentent de
cacher la forêt. En back office, ce sont les USA et l’Union Européenne qui
poussent à la fronde et qui sans le dire torpillent déjà l’accord. Tous les
compromis – y compris les plus destructeurs – sont en train de se sceller dans
le secret sans tenir compte des petits producteurs spoliés de leurs terres, des
communautés vulnérables, des droits des peuples autochtones et des agriculteurs
exposés à la sécheresse ou à la salinisation de leurs terres. « C’est triste car c’est l’une des premières
fois où j’assiste à une COP où personne ne tape du poing sur la table »
se désole un acteur de la société civile.
Tous responsables au cas où…
Sans
colère, sans le moindre sursaut d’orgueil, sans éclat de voix l’avenir de la
planète se joue dans une pseudo-négociation pour un accord qui au final
ressemblera bien plus à un gentleman agreement…et rien d’autre ! C’était
comme si en venant à Paris "certains" avaient déjà rédigé l’accord
d’où la colère de la société civile. Pour le montrer, un vaste rassemblement a
réuni une centaine de manifestants dans le Hall 2 du site du Bourget non loin
des pavillons de la France, des Etats Unis, de la Chine et de l’Arabie
Saoudite. Bien avant ce mouvement encadré par la police des Nations Unies, une
conférence de presse a été organisée par le Réseau action climat. Au cours des
échanges avec la presse, Jean-François Julliard, directeur général de
Greenpeace France a indiqué que si un accord devait aboutir sur la base du
texte présenté il serait juste « un
accord sur papier ». Un accord sur papier que devront assumer tous les
Etats présents à Paris y compris ceux qui depuis le premier jour se sont placés
dans la position de pays vulnérables. Les pays africains ne sont pas en reste
car l’Afrique produit une infime partie du CO2 mondial mais subit les effets du
réchauffement climatique. Si les 54 pays africains se taisent, ils devront
subir un accord qui donnera plus de poids aux gros pollueurs. L’Afrique plutôt
absente des débats n’est présente qu’avec une dizaine de négociateurs par
session or de nombreuses délégations venues du continent séjournent à Paris aux
frais du contribuable. Une désertion qui fait dire à certains acteurs des
droits de l’homme que les délégués sont bien plus en tourisme qu’en
négociation. « S’ils fuient les
salles de négociation c’est bien parce qu’ils n’ont pas les bons arguments face
à l’argent des pays riches » déplore un jeune cyber activiste
originaire du Tchad. L’odeur de l’argent perturbe à ce point les
africains ? Aïssatou Diouf, chargé de plaidoyer changement climatique à
ENDA Energie veut bien croire que non. Même si elle se désole que les
négociations semblent échapper au contrôle des africains, elle espère qu’une
stratégie se peaufine en secret pour que le contient ne puisse pas être laissé.
Notons que la journée de négociation du 9 décembre a été marqué par un meeting tardif
autour de 20 heures dans la salle des plénières. La rencontre interdit aux
médias a permis de présenter la méthode de travail des négociations pour la
nuit de mercredi à jeudi. Un premier groupe se réunira autour des points
politiques : différenciation, financement et ambition. Les autres points de l’accord
seront examinés dans une deuxième réunion en parallèle. On peut sans risque de
se tromper dire que c’est la dernière ligne droite et que les délégations
travailleront certainement afin qu’un accord définitif soit présenté ce
vendredi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire