mardi 24 novembre 2015

La COP 21 vue du Bénin : un exemple de discordance entre l’Etat et la société civile

Conformément aux décisions issues des deux derniers sommets en date, notamment la COP 19 de Varsovie et la COP 20 de Lima, les Etats devront présenter au prochain sommet de Paris, ce qu’il convient d’appeler leurs « Contributions Prévues Déterminées au Niveau National (CPDN) », connu sous le vocable anglais Intended National Determined Contribution. Lors d’une sortie médiatique le 4 septembre 2015, le Gouvernement, par la voix du Ministre de l’Environnement chargé de la gestion des changements climatiques Théophile Worou, avait officiellement dressé le tableau des préparatifs du Bénin. L’autorité avait à cet effet indiqué que le Bénin avait déjà fait acheminer son rapport depuis le 7 août 2015 au Secrétariat Exécutif de la Conférence. 

Un document officiel récapitulant pour l’essentiel les efforts et les engagements futurs au plan national en matière de lutte contre le réchauffement climatique. 
La soumission dans les délais de ce document, avant la tenue de la Conférence de Paris, nourrit comme un sentiment de satisfecit auprès des autorités béninoises qui se vantent d’avoir mobilisé une double approche participative dans le processus d’élaboration dudit document. D’abord, une approche nationale qui aura consisté en la mise en place d’un comité de rédaction composé d’experts indépendants, d’universitaires, de cadres techniques ainsi que d’autres personnes ressources suffisamment outillés sur les questions de l’environnement et des changements climatiques. Ensuite, une autre approche communautaire avait également permis aux officiels béninois de saisir l’opportunité de plusieurs rencontres organisées dans le cadre de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et du Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS), afin d’améliorer la qualité du document soumis.
Les thématiques de fond abordées dans ce document s’articulent autour de la problématique de l’Atténuation et de l’Adaptation aux changements climatiques ainsi qu’à bien d’autres aspects transversaux au sujet desquelles les discussions au plan national ont constamment mobilisé ces derniers mois les membres du Comité national sur les changements climatiques. A travers ce rapport, le Bénin entend résolument s’engager à réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs de production et de consommation d’énergie, de transport, de l’agriculture et de la foresterie puis à mettre en œuvre des plans et programmes dans le domaine de l’adaptation avec des co-bénéfices pour l’adaptation. 

Adaptation et atténuation : encore la rhétorique des projets et programmes « budgétivores » ?

Face aux effets dévastateurs du dérèglement climatique, la nouvelle focale est définitivement connue : adaptation et atténuation. Il s’agit bien là d’un binôme de solutions autour duquel l’accord semble plus ou moins aujourd’hui consensuel à l’échelle planétaire. Au Bénin, cette nouvelle rhétorique est, depuis quelques années, reprise et ventilée dans les discours officiels et elle s’accompagne d’une tendance à la prolifération et à la démultiplication des projets et programmes susceptibles d’engloutir de « gros sous » et  exposés à des risques de malversation et à la mauvaise gestion.
En l’espace de 10 ans, comme pour satisfaire à la mode, le Gouvernement du Bénin a initié près d’une demi-dizaine de projets et/ou programmes se voulant revendiquer d’une vision « durable » : le Programme intégré d’adaptation pour la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques sur la production agricole et la sécurité alimentaire dans quatre zones agro écologiques du Bénin (Pana 1), le programme d’adaptation aux changements climatiques par la promotion des énergies renouvelables et des foyers économiques performants et autocuiseurs face à la pénurie du bois-énergie au Bénin (Pana 2), le projet « 10 millions d’âmes, 10 millions d’arbres », le projet de mobilisation des eaux de surface aux fins d’adaptation aux changements climatiques (micro-barrages) (Pana 3), le projet de protection des femmes enceintes et des enfants de moins de cinq ans contre les vecteurs de maladies liées aux risques climatiques au Bénin (Pana 4), le projet de protection de la zone côtière face à l’élévation du niveau de la mer/érosion côtière (Pana 5).

 Si l’objectif de s’inscrire dans la formulation des solutions durables peut justifier une telle vitalité dans l’initiation accélérée des projets et programmes au plan national mais aussi celui de se fabriquer l’image d’un pays « bon teneur de promesses » et donc de « bon élève » aux yeux du monde, il sied, sans nul doute, d’éviter de biaiser la démarche en s’offrant des projets qui apparemment se chevauchent, « budgétivores » et finalement improductifs. C’est en cela qu’émerge une catégorie d’observateurs qui estiment que « toute solution n’est la solution ». Certes, il est accrédité des financements des programmes nationaux mais il est aussi question de « faire attention pour ne pas financer des fausses solutions ».   

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