mardi 24 novembre 2015

Bio charbon: Manque de financements pour moderniser la production

La production artisanale du bio-charbon est de 100 Kg par jour. Elle pourrait atteindre une tonne si le processus se modernise. On estime pourtant la consommation totale de bois énergie (bois de feu et charbon de bois) à plus de 15,6 millions tonnes par an dans le pays. Il faut penser à étendre le projet à l’échelle nationale afin de couvrir les besoins. 


« Imaginez-vous chez le boutiquier, dans les rayons, il y du bio-charbon ? A l’échelle industrielle, c’est l’objectif qu’on vise », déclare Coné Gaoussou.
L’Institut de recherches sur les énergies nouvelles travaille sur la modernisation du matériel de production (le réacteur de pyrolyse et la presse à retord). Et aussi sur l’amélioration du pouvoir calorifique du bio-charbon : il ne brûle pas entièrement et laisse trop de déchets après la cuisson. Dans cette université où une partie de l’hôpital est alimentée depuis six mois à l’énergie solaire, l’expertise existe : du biogaz a été produit entre 2003 et 2006, dans le cadre d’un projet de renforcement des capacités sur le mécanisme pour un développement propre (MDP). Mais, il y a un manque de financements pour mener des études plus poussées, notamment sur les caractéristiques des matières premières. En tout cas, le potentiel est immense. La Côte d’Ivoire produit annuellement 12 millions de tonnes de biomasse issues des déchets ménagers, agricoles et forestiers. Outre le charbon, elle peut les valoriser pour produire d’autres types d’énergie comme le gaz, le carburant, l’électricité…
Cette association communautaire espère bénéficier d’un appui dans le cadre de la phase pilote Redd+ qui devrait démarrer début 2016 afin de vulgariser le nouveau type de charbon et le fourneau associé. Avant sa mise en œuvre à l’échelle nationale, ce mécanisme vise à poser les bases d’une économie verte au niveau local, en conciliant la réduction de la pression sur les ressources naturelles et le développement rural, la cacaoculture en tête. Les projets vont du découplage agriculture-déforestation à la promotion de l’énergie domestique durable, la gestion durable des forêts et le reboisement. « L’objectif est de mesurer les impacts du projet et appuyer le processus national Redd+, notamment en termes de mobilisation des financements nécessaires au changement d’échelle et au déploiement d’une approche juridictionnelle. Les activités concerneront l’impact climatique, socio-économique et environnemental ainsi que la recherche-action », souligne Edouard Kessé Brou Ané.

Projet intégré au profit des populations rurales
Les promoteurs du bio-charbon voient grand. Si pour le moment, les déchets sont offerts gratuitement, cela pourrait changer lorsque le projet sera à l’étape industrielle – ce qui pourrait prendre pas moins de cinq années... Le montant de 5 FCfa/Kg de déchets de produits agricoles est déjà avancé ; ça sera une ressource financière additionnelle pour les fournisseurs. L’association dispose de près de 14 hectares de forêt. Et elle ménage sa monture pour avoir une indépendance dans son approvisionnement en matières premières et maximiser ses profits. « C’est un projet intégré. Il faut, au niveau de l’association, avoir une petite unité de transformation, prendre l’initiative de la production de vivriers et produits agricoles qui nous permettent d’avoir les déchets, les racheter et les transformer. Ça nous permettra d’avoir un premier déchet. Si on a n’en pas en quantité suffisante, on va maintenant racheter avec les autres », soutient son secrétaire général.
Depuis le lancement officiel du bio-charbon le 18 août 2015, certains l’utilisent pour la cuisson. Le Fonds des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (Fao) a subventionné 100 foyers améliorés qui ont été distribués gratuitement aux ménages. La production devrait s’accélérer dès ce mois de novembre : entre 300 et 400. « Quand tu achètes un fourneau Mdabo, tu as un Kg de charbon Mboby. Son utilisation par les ménages nous permet en même temps de faire des tests », fait remarquer Coné Gaoussou, toujours préoccupé d’améliorer aussi bien la qualité du bio-charbon que des fourneaux.
Traoré Yacouba, est un ferronnier qui travaille avec des moyens rudimentaires. Il a été contacté pour construire un autre réacteur à pyrolyse plus grand et plus efficace. « Celui là est meilleur que le premier », lance-t-il, fier de son œuvre.
Les coques  de riz  et les résidus de café sont les deux principales matières utilisées pour le bio-charbon. La ville compte quatre moulins et abrite une coopérative de café-cacao qui a une production annuelle de 2 000 tonnes. De quoi garantir un approvisionnement régulier à l’association. Rendre l’environnement propre par la transformation des déchets naturels en énergie… 
A Affery, baptisé ‘’village Redd+’’, les habitudes ont changé avec l’introduction du bio-charbon. A quand le tour du reste du pays ? L’Etat ivoirien, qui veut au moins porter à 16% d’ici 2030 la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique, avec 26% de charbon dans la consommation d’énergie, doit s’impliquer fortement dans la vulgarisation de ce projet.


Anderson Diédri

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